Overblog
Editer la page Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
/ / /

Je découvre zao wou ki à 44 ans: mieux vaut tard que jamais...

 

Zao1.jpg

 

Le Maître au travail...par terre, comme dans l'action painting de Jackson Pollock

par terre aussi comme un enfant joue et étale tous ses jouets dans la salle

par terre à genoux, "génuflexion" de celui qui s'incline par respect face à l'instant...

 

Alors bien sûr on parlera des liens entre occident et orient, pour un peintre chinois en France, c'est un premier "passage" obligé. Et il est bien vrai que sa peinture rappelle la caligraphie traditionnelle chinoise, en même temps qu'elle s'inscrit dans l'art abstrait américain/européen.

 

Voyons d'abord ses premières oeuvres, influencées par les plus grands de la première moitié du vingtième siècle que sont Picasso, Matisse, Chagall, Klee...

ZaoWouKi_Nusousl-arbre1949.jpg

"Nu sous l'arbre" 1949, rappel de Matisse et Cézanne, non?

 

ZaoWouKi_paysageaux3lunes-1949.jpg

"Paysage au trois lunes" 1949, des échos visibles de Paul Klee...

 Tout comme dans "Corrida" de 1953!

ZaoWouKi_corrida1953.jpg

 

Ou bien encore celui-ci, inspiré sans doute du palio de sienne :

ZaoWouKi-Italie1950.jpg

 

 

 

Zao Wou ki est connu pour ces nombreuses fresques abstraites, dont certaines sont dans des tons sombres:

ZaoWouKi_poursuite19551957.jpg

"Poursuite" 1955-1957 fait penser à une atmosphère tourmentée, vision intérieur d'un cosmos en dégradation ou bien en formation, avec des signes ponctuant la toile, à l'image d'idéogrammes asiatiques, à l'image de fractures de la matière  comme on en voit dans les fractales de la physique du chaos (20 ans avant l'apparition de cette nouvelle science alors inconnue...), restituant aussi une impression de saint suaire oriental ayant subi les assauts du temps.

 

L'austérité qui se dégage de certaines toiles n'est pas sans rappeler Soulages et son immense travail sur le noir:

ZaoWouKi_01-03-60.jpg

"01-03-60" où le titre = la date ! ...austérité de l'appellation? ou simplement dépouillement, désir de porter l'attention vers les seules références intérieures et spirituelles que chaque spectateur voudra (ou pourra) bien y mettre?

 

 

ZaoWouKi_21-07-68.jpg

"21-07-68"     là, le noir s'éclaircit, en cette fin de décennie. On pourrait presque s'imaginer devant une estampe millénaire, estompée par le temps, ramenée à la suggestion d'un jardin par les seuls jeux de valeurs.

Mais est-ce vraiment raisonnable de s'accrocher à retrouver des impressions, des suggestions, des évoquations de formes naturelles là où le peintre est déjà depuis longtemps détaché de tout souci formel?

ZaoWouKi-sanstitre2003.jpg

"Sans titre" 2003

retour aux sources, ou bien va-et-vient entre modernisme et tradition, impressions et éclats intérieurs.

Je ne peux m'empêcher de suivre les points, les lignes, les masses pour y retrouver des échos de mes émotions face à d'autres tableaux, représentant ici des plantes ou des bourgeons, là des horizons, un équilibre dans cet espace où on se surprend à visualiser les gestes du peintre, jeté par terre sur la toile, ou plutôt ponctués de cette "nécessité intérieure" dont parle tant Kandinsky dans son livre .

 

kandinsky dit aussi dans son article sur "la forme":

"L'essentiel n'est pas que la forme soit personnelle, nationale, d'un beau style, qu'elle corresponde ou non au courant général de l'époque (...) l'essentiel, dans la question de la forme, est de savoir si elle est née d'une nécessité intérieure ou non".

 

d'autres tableaux...

ZaoWouKi_25_06_2003.jpg

 

ZaoWouKi_18_09_2001.jpg

 

ZaoWouKi_05-01-2000.jpg

 

 

Toutes ces ouvertures vers l'univers intérieur du peintre relèvent de ce que les spécialistes appellent "l'abstraction lyrique". Sur ce terme et le sens que l'on peut y voir, il faut sans doute partir de Georges Mathieu, qui, en 1947 réagit contre l'abstraction géométrique de façon virulente en se portant chef de file de ce que lui-même nomme abstraction lyrique. Le premier à avoir "pensé" et "théorisé" l'abstraction, Kandinsky, parle effectivement de l'intérêt d'utiliser les formes géométriques simples, mais lui-même est un exemple d'abstraction lyrique on ne peut plus éloquent...

Citons aussi Wols, Hartung, Riopelle, Soulages...classés aussi parfois en tant que caliigraphes, ou appartenant au tachisme, à l'art informel...bref, pour y voir plus clair dans tous ces "-ismes" de tout poil, se reporter au bouquin "les mouvements dans la peinture" chez Larousse...

 

Le problème de la forme contient bien sûr en creux celui de l'informel. Lorsque l'on se débarasse de tout contrainte liée à la forme, alors on ouvre les portes de l'Art Informel. Apparu en Allemagne dans les années 50 et 60, on doit au critique d'art Michel Tapié le nom d'informel, dans une expo intitulée "tendances extrêmes de la peinture non figurative". Il s'agirait donc de ne pas ou de ne plus être figuratif... Quant aux tendances extrêmes, il faut aussi évoquer l'Art Brut, presque primitif et proche de celui produit par les malades mentaux, en intégrant des matériaux hétéroclites et insolites sur leurs toiles...puis on arrive au Minimal Art, avec les bandes ou les monochromes de Newman...

 

et après?

 

vers quel but tendra l'abstraction?

 

j'aimerais croire aux écrits magnifiques de Hermann Hesse, à ses nouvelles comme "l'homme qui voulait changer le monde" qui, après s'être exilé, revenant vers les siens, réalise alors que ce qu'il cherchait était en fait devant ses yeux,

ou encore à ceux de Novalis parlant du chemin mystérieux qui va vers l'intérieur:

"Quelqu'un y parvint

souleva le voile de la déesse, à Saïs

Mais que vit-il ? il vit

merveille des merveilles

soi-même"

 

 

Partager cette page
Repost0